CONFERENCES
CONFERENCE du jeudi 29 Août 2019 Salle MICOLIM, commune de KIMBANSEKE
Thème : Théorie de système pour la réussite du développement
EXPOSE de Christophe MASAMBA
L’Afrique subsaharienne face aux enjeux du développement
1° Bientôt trente cinq ans depuis mon arrivé en France, je ne peux compter le nombre de rencontres et conférences organisées dans plusieurs cadres. Sur l’Afrique, ce sont toujours les mêmes thèmes qui reviennent: “Développement, pauvreté, dictatures, violences, guerres et répression”. Des pays sous développés après les indépendances, ils sont devenus des pays en développement, aujourd’hui je ne sais pas quel qualificatif sera attribué à ces pays dans les années qui viennent. Je crains fort que dans cinquante ans, les enfants qui naissent en maternité aujourd’hui ce soient ceux se réuniront pour le même problème: « Développement de l’Afrique ».
Pour le développement de l’Afrique, on ne peut pas dire que rien n’a été fait. On peut cependant observer que ce qui a été fait, l’a souvent été sans le consentement libre des africains. On trouve des initiatives africaines et extra-africaines.
Sur les initiatives Extra-africaines,
Il est très important de rappeler qu’elles sont souvent le fait des institutions tels que le PNUD, le FMI, la Banque Mondiale:
Pour rappel :
Le Programme des Nations unies pour le développement (PNUD), fait partie des programmes et fonds de l’ONU, pour aider les “pays en développement” en leur fournissant des conseils et en plaidant leurs causes pour l’octroi de dons.
Le Fonds monétaire international (FMI) institution qui veille à la stabilité du système monétaire international et exerce une surveillance sur les politiques de change, donc les banques centrales des pays demandeurs.
La Banque mondiale, aux côtes des “pays en développement” qui a pour mission de réduire la pauvreté et accroître la prospérité partagée, en fournissant des financements, des conseils et de l’assistance technique aux pouvoirs publics, et s’attache à renforcer le secteur privé dans les pays demandeurs.
Sur les initiatives africaines ont trouve
Le plan Oméga proposé en janvier 2001, par le président sénégalais Abdoulaye Wade au sommet France-Afrique de Yaoundé, visait à “résorber l’écart entre pays développés et pays sous-développés par des investissements massifs d’origine externe, coordonnés à l’échelle continentale, pour poser les bases du développement du continent africain”.
Le plan MAP des présidents algérien Bouteflika, le nigérian Obasanjo et Thabo Mbeki de l’Afrique du sud, est un plan qui tentait principalement d’incorporer l’Afrique au sein des actions mondiales.
En juillet 2001, au sommet des chefs d’État de Lusaka, les deux plans, Oméga et MAP, fusionnent sous le nom de NEPAD.
Faute de financements Extérieurs, les projets du NEPAD sont morts et pour sauver la face, le NEPAD deviendra l’un de ses programmes de l’Union africaine sans objectif clair. En 2018, il change de nom et devient l’Agence de développement de l’UA.
De ces deux initiatives on a pu observer que :
- L’une extra-Africaines portait des conditions de financements qui servaient à faire revenir les fonds prêtés à un pays africain, dans les banques des emprunteurs.
- L’autre africaine qui ne pouvait être financé par personne, finalement l’Afrique n’a pas pu suivre la marche du monde.
On connait le rôle de matières premières et minerais stratégiques dans l’entretien des régimes durs et rétrogrades avec les rivalités EST -OUEST pendant la guerre froide. On pouvait croire que la fin de la guerre froide allait changer les choses, mais à cause d’un blocage néocolonial, les pouvoirs restent contrôlés par des dirigeants adeptes de l’extraversion politique, économique, culturel et financière.
Pour toutes les questions politiques, économiques et financières, l’avis final est resté celui d’une grande puissance, qui peut défaire les régimes africains qui n’obéissent pas. La démocratie a été un réel espoir de tous les africains, car c‘est leur vrai nature, il suffit d’observer les sociétés traditionnelles et le fonctionnement de nos familles, où ce n’est ni le plus riche ou le plus fort qui a raison, ou qui devient le chef, mais intervient toujours une délibération à la majorité.
C’est bien ça qui a fait l’équilibre social dans les sociétés traditionnelles d’Afrique où les plus fragiles bénéficient de la solidarité de la communauté.
Je pense que personne ne peut pas réussir de façon durable sans suivre sa propre nature, ainsi donc en nous écartant de notre démocratie traditionnelle, nous n’avons aucune chance d’aller vers le développement dans le sens d’avoir un indice de développement humain (IDH) acceptable, indice statistique pour évaluer le taux de développement humain des pays du monde selon trois critères : le PIB par habitant, l’espérance de vie à la naissance et le niveau d’éducation des enfants de 17 ans et plus.
Ceci nous oblige à examiner les éléments les plus simples du système de développement qui dépendent malheureusement des dirigeants politiques qui doivent les mettre en œuvre. On trouve ainsi : le Système Productif, les moyens de financement et la capacité des hommes.
Sur le système Productif : je parlerai des trois secteurs : le primaire, le secondaire et le tertiaire.
1° Secteur primaire agriculture et élevage. (Production).
Travailler beaucoup, mais sans profiter complètement du travail, la production n’est consommée que moins de la moitie, le reste est rapidement avarié. L’exemple ici c’est l’agriculteur qui produit du manioc, des tomates, du cacao du café, des fruits etc…
2 ° Secteur secondaire (transformation de la production)
Ici interviennent les usines avec génération des plus values et à ce niveau, on commence à parler de création d’emploi industriel, recrutement de personnel de façon intensive, pour avoir une incidence sur la réduction du taux de chômage. C’est le secteur le plus efficace pour offrir des emplois aux citoyens.
3° Secteur tertiaire (Distribution de ce qui a été produit puis transformé)
Élément majeur parce qu’il permet de distribuer que l’on a transformé soit sur le plan local ou sur le marché international qui permettront de générer des devises étrangères. Nous constatons depuis longtemps que sur ce domaine économique aussi capital, les ex – colonisateurs ont poussé ces pays à rester dans le secteur primaire, pour ne pas pouvoir capter la valeur réelle constituée par le système productif. On produit uniquement des produits premiers pour commercialiser à ceux qui sont engagés dans les deux autres secteurs (secondaire et tertiaire).
Si dans le commerce on gagne, il faut reconnaitre que cela n’est pas toujours vrai, et on perd parfois. Mais dans le cas précis des matières premières africaines, les acheteurs gagnent toujours et les vendeurs africains perdent toujours, puisqu’ils sont condamnés à vendre aux seuls et mêmes acheteurs exclusivement.
Sur les moyens de financement.
Il suffit de répondre à ces quelques questions, pour comprendre :
1° Que seraient la France, les États-Unis, la chine, si les Banques n’avaient plus de capacité de financer les crédits à l’investissement de leurs petites et moyennes entreprises ?
2° D’où proviennent les fonds détenus par les Banques pour faire du crédit ?
3° Pourquoi les États avancés tiennent à l’épargne de leurs populations et à favoriser les ouvertures des comptes Epargne par les Banques ?
Je pourrais allonger la liste de ces questions, pour montrer que le développement est de notre seule responsabilité.
Tout ça pour dire que l’extrême pauvreté du peuple ne peut favoriser un développement, car au niveau le plus simple, c’est l’épargne du peuple qui est la première force motrice du financement dans une économie endogène. En Afrique, le compte en Banque n’est pas obligatoire, conséquence l’argent intérieur n’est pas intégré dans le circuit financier et par conséquent ne permet pas de financement des meilleurs projets des citoyens. Sur 80 millions habitants, moins de cinq cent mille ont un compte en banque et de tous les actifs moins 1% seulement détiennent un compte.
Dépendre des financements extérieurs ne permettra jamais un quelconque développement. La phrase du Professeur Joseph KI-ZERBO en dit long : « Dormir sur la nette des autres, c’est comme si on dormait par terre ».
Sur la capacité des hommes, il s’agit de la qualité de formation
C’est la poursuite d’un système éducatif hérité de la colonisation qui forme des élites qui se considèrent naturellement incapables de transformer les matières premières, devenant des promoteurs de l’aliénation intellectuelle qui fonde toute pensée, sur la volonté des puissants du monde ; avec comme conséquence, l’extraversion politique, culturelle, économique et financière. On peut constater qu’il y a quand même un espoir, lorsqu’ avec la rencontre des autres cultures, de plus en plus des jeunes africains remettent en question cette pensée, découvrant ainsi leurs vraies valeurs et capacité d’invention des solutions à leurs propres problèmes.
En Afrique le délestage électrique est intégré par nos populations comme une normalité, or sans cette énergie, c’est la chaine de tout le système économique qui est rompue. Ce qui m’emmène à cette dernière interrogation: Sans énergie électrique pendant un jour, quel serait le niveau de perte économique en France, en Allemagne, en Chine et aux Etats-Unis ? Comme partout dans tous les pays avancés, l’Afrique a besoin de l’énergie pour tous, pour espérer un développement.
L’histoire nous apprend l’existence de plusieurs chemins pour prendre la direction d’un pays : les révolutions de palais, les révolutions populaires, des coups d’Etat, parfois guidés par la conscience politique. Aujourd’hui, le développement endogène est la lutte que nous devons tous nous approprier, comme celles menées par nos parents pour les indépendances. Mais cette lutte exige une prise de conscience des enjeux, sans laquelle, il est impossible de penser Développement.
Pour terminer, je dis ici que notre prise de conscience est la clé et que le seul bagage technique et scolaire même excellent ne suffit pas. Pour cette lutte pouvons tous ici dire INGETA ! INGETA !
Permettez-moi enfin de vous remercier de m’avoir suivi avec attention.